Depuis la fin du vingtième siècle, les enjeux liés à la biodiversité ont une incidence croissante sur les arrangements institutionnels relatifs au foncier. Les effets des politiques environnementales ne sont néanmoins pas univoques. D’un côté, on observe la permanence de l’opposition entre usage et conservation des terres qui entraîne une sanctuarisation de certains espaces (aires de protection intégrale par exemple). De l’autre, certaines politiques cherchent à faire converger activités productives (agriculture, industrie, mines) et activités de conservation et impliquent une redéfinition des objectifs et des pratiques des acteurs en présence. Les catégories classiques de ressource naturelle et d’environnement éclatent en une multitude d’objets –comme l’agrobiodiversité ́ou les services écosystémiques –qui incorporent de nouveaux outils aux effets fonciers souvent indirects mais réels (paiements pour services environnementaux, compensation écologique). Tous ces processus complexifient les modes d’appropriation du foncier et soulèvent la question des frictions entre droits et politiques s’appliquant aux objets différents et liés que sont le foncier et l’environnement.
Cette journée sera l’occasion de se demander dans quelle mesure ces politiques de la biodiversité entraînent une recomposition des pouvoirs et des droits liés à la terre et aux ressources, entre empowerment et dépossession des populations locales, immixtion et cantonnement des acteurs dominants. Une attention particulière sera apportée à la dynamique d’insertion de ces politiques de conservation dans un contexte privilégiant à la fois les mécanismes réels et l’idéologie du marché. De même, il conviendra de s’interroger sur la nature de ces politiques d’extension d’aires protégées, tantôt considérées comme de véritables actions d’accaparement des terres pour des motifs de conservation (green grabbing), tantôt comme des freins à l’extension des concessions économiques (agro-industrielles, forestières, etc.), tantôt comme des leviers d’émancipation des populations marginalisées.