Recherche sur le foncier rural au Sud Structurer Valoriser Dynamiser
1 | 2012 Par : Seignobos Christian ;

Après la seconde guerre mondiale, l’administration coloniale du Nord-Cameroun découvre” les conflits fonciers. Ils sont imputés à deux causes : d’une part, les karal ou vertisols réservés aux sorghos repiqués deviennent des enjeux fonciers majeurs et, d’autre part, les piémonts des monts Mandara septentrionaux commencent à connaître un surpeuplement qui engendre la multiplication des querelles de limites de “commandements”.
Les administrateurs coloniaux ont été pris dans leur propre logique d’encadrement et ont dû faire face au “problème foncier”. Pour mieux contrôler les populations montagnardes, les administrateurs les incitent à descendre en plaine, sans pour autant leur donner des terres. Ils se trouvent confrontés au refus des chefferies musulmanes, qui ne veulent pas remettre en cause leur monopole foncier acquis, pour les Peuls, au moment de la conquête du XIXe siècle.
Certains administrateurs veulent croire que la dynamique démographique des “Kirdis” (non musulmans) en face de populations peules déclinantes résoudra le problème. Mais, ce que les Peuls perdent en croît naturel, ils le gagnent par la foulbéisation et l’islamisation de ces mêmes Kirdis. L’administration coloniale s’essaie à d’autres approches, comme l’encadrement agricole des populations montagnardes déplacées vers des zones peu vivifiées de la plaine, à travers des « casiers de colonisation », qui seront autant de demi-échecs.
La “question agraire” est posée, elle est confiée, pour règlement, à des élèves administrateurs. Les chefs de circonscription qui les supervisent voient d’entrée la charge politique explosive qu’elle porte et conseillent d’agir au cas par cas, sans légiférer. L’administration nationale, qui prend le relais, n’a pas réellement voulu s’engager dans la résolution de ce problème, ni affronter la hiérarchie des pouvoirs traditionnels, dont la main mise sur la terre représente l’essentiel de l’autorité. Un demi-siècle après, la situation reste inchangée.

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